Le dernier été en ville

femme allumant une cigarette

Le dernier été en ville

Gianfranco Calligarich

Gallimard, « Du monde entier », 2021

 

Un roman culte au destin particulier

Le dernier été en ville, c’est une histoire d’amour et de solitude. Le récit du renoncement paisible d’un homme inadapté au monde, qui a pour décor la Rome éternelle. Un livre qui est paru en Italie en 1973. C'est le premier roman de Gianfranco Calligarich, journaliste, scénariste et écrivain italien né en 1947 et qui a grandi à Milan.
Petit succès à sa sortie, il est très vite épuisé et introuvable. Puis, en 2010, une autre maison d’édition le republie et c’est un succès critique ; de nouveau vite épuisé, c’est un trésor de bouquiniste. Le roman devient alors culte.
En 2016, une troisième maison d’édition le republie et c’est un engouement international. Le roman est traduit dans 13 pays, les droits sont achetés pour une adaptation au cinéma. Il est ainsi publié en France seulement en 2021 dans la superbe collection « Du monde entier » de Gallimard, puis en Folio en 2022.

Un antihéros mélancolique

Ce roman, inspiré de la vie de l'auteur, raconte l’histoire de Leo Gazzara, tout juste 30 ans, né à Milan dans un milieu modeste, qui a rejoint la Rome de la fin des années 60, la ville de tous les possibles. Leo y vivote, exerce des petits emplois dans le domaine du journalisme et fréquente la bourgeoisie intellectuelle. C’est un garçon sans grandes ambitions, séduisant, intelligent, très cultivé, qui passe son temps à lire, à aller au cinéma ou à la plage tout en menant une sorte de vie à la dérive, pleine de mélancolie et d’ironie désenchantée mais aussi de colère et d’abattement. Léo se laisse porter par des journées qui se ressemblent et des nuits alcoolisées où il déambule dans sa ville d’adoption.
Lors d’une soirée mondaine, il rencontre la belle et exubérante Arianna. Elle a de l’esprit et ils sont tout de suite attirés l’un par l’autre. Ensemble ils vont mener une relation intermittente. Elle va et vient, elle est sûre de sa beauté, sûre de se faire pardonner. Cette relation qui pourrait le sauver ne fait que le tourmenter, mais il se rend compte que lui aussi a sa part de responsabilité dans cet échec.

Un style et une ville

Gianfranco Calligarich arrive par sa plume à rendre palpable une sorte d’ennui, d’amertume face à la vie adulte, mais Léo n’est pas un personnage torturé et sombre. Il y a chez lui une acceptation lumineuse de sa condition d’être inadapté à tout. Ce roman, écrit dans une langue magnétique, sobre, simple et percutante, c’est l’histoire d’une dérive sentimentale et existentielle mais qui parle aussi de la beauté de se laisser vivre, de prendre le temps de regarder autour de soi. Les portraits des personnages sont magnifiques.
S’y glissent aussi des réflexions sur la littérature, la politique ou la société. Notamment sur les liens familiaux compliqués en Italie ; la génération de Léo, ce sont les enfants des soldats de l’Italie fasciste. C’est aussi une critique de la bourgeoisie intellectuelle et de sa futilité qui s’exprime dans les réflexions de Léo, lui qui vient d’un tout autre milieu.
Ce roman, c’est enfin, au fil des saisons, un superbe portrait de la ville de la Rome iconique de la fin des années 1960 dans toute sa beauté languissante et décadente. Bien sûr cet antihéros mélancolique dans la ville aux sept collines rappelle La dolce vita, l’ambiance du roman est fellinienne, mais il y a aussi un peu de Fitzgerald et de Hemingway. 

Un coup de cœur à lire d’urgence !

Benjamin, juillet 2024

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>> Entretien avec l'auteur dans l'émission "La Grande table" sur France Culture