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Sélection 2020 soul, rap & reggae

 

 

I - Soul

Vous prendrez bien un peu de salade en entrée ? Lettuce (laitue en anglais), groupe de funk originaire de Boston, permet d'entamer cette sélection à pleines dents grâce à un album de funk instrumental bien relevé : Resonate.

Le batteur Makaya McCraven rend à Gil Scott-Heron un hommage qui n'a rien de réchauffé. We're new again est une relecture de I'm new here, ultime album de l'influent chanteur soul-jazz, père spirituel de la scène rap new yorkaise disparu en 2011.

Puisque nous sommes à New York, attardons-nous sur l'omniprésent producteur multi-instrumentiste Leon Michels. Son label Big Crown a publié, entre autres, Float back to you, une merveille de soul-folk en apesanteur signée Holy Hive.
Avec son groupe El Michels Affair, il a également sorti Adult themes, un album de soul pop cinématographique qui n'est pas sans évoquer le Gainsbourg des années 70.

Quitte à s'inspirer des musiques de films, les Anglais de The Sorcerers ont carrément composé la bande originale d'un film imaginaire. In search of the lost city of the monkey god (tout un programme) est un délice instrumental évocateur, mélange bruissant d'éthio-jazz, de soul, de funk et d'exotica. Idéal pour voyager en temps de restrictions de déplacement !

Il faudra un jour tourner un film sur le légendaire chanteur et producteur Swamp Dogg. À 78 ans, il démontre avec Sorry you couldn't make it qu'il reste un maître de la country soul décalée et des ballades poignantes.

Chicago pourrait bien avoir trouvé un successeur aux Impressions avec The Devonns. Leur premier album sans titre s'inscrit en tout cas dans la lignée des grands disques engagés de Curtis Mayfield ou de Marvin Gaye. Il y a pire comme référence…

Dans la même veine, les retrouvailles, après une parenthèse solo très réussie, du chanteur Kelly Finnigan et de son groupe Monophonics ont abouti au sombre mais très recommandable It's only us.

Car on peut être Californien et sujet à des accès de mélancolie, comme le prouve Son Little avec son superbe Aloha, dont la douceur musicale cache de noires pépites.

C'est également le cas de How the mighty fall d'Izo Fitzroy. Si la chanteuse britannique s'autorise quelques morceaux dansants, c'est sur ceux plus sombres et personnels qu'elle brille le plus. Écoutez-donc "When the wires are down", où plane le fantôme de Nina Simone…

Pour finir sur une note entraînante, fiez-vous au panache rouge de Whitney Shay, et à son album au titre-programme : Stand up !. Son énergie et sa voix puissante soutenue par des cuivres qui claquent devraient vous aider à passer l'hiver en forme.

 

II – Rap

Dans la catégorie rap international, le podium, 100 % américain, est occupé par des duos. Sur la première marche, le couple paritaire (c'est assez rare dans le milieu pour être signalé) formé par le producteur Apollo Brown et la rappeuse Che'Noir. Avec son flow lancinant et ses textes percutants, cette dernière est la vraie révélation de As God intended.

Quand Al (The Alchemist) rencontre Fredo (Freddie Gibbs), cela aboutit logiquement à un album titré… Alfredo. L'alliance du légendaire producteur (collaborateur, entre autres, de Mobb Deep, Nas ou Eminem) et du rappeur ex-dealer repenti débouche là encore sur un album sombre et ramassé, porté par des samples efficaces et quelques invités bien choisis.

En 2013, leur association n'avait pas vocation à durer. Sept ans plus tard, Run The Jewels reste un projet majeur dans les carrières d'El-P et Killer Mike. Engagé et énervé, leur 4ème album, sobrement intitulé Run The Jewels 4, prouve qu'ils n'ont rien perdu de leur rage ni de leur inventivité.

L'approvisionnement en CD ayant été fortement perturbé en 2020, on complètera ce tiercé gagnant en écoutant quelques outsiders sur MusicMe.
Signalons en particulier la vitalité de la scène britannique, avec notamment 2 productions old school du producteur londonien Illinformed : l'une avec Verb T. (The Land of the foggy skies), l'autre avec Gee Bag (Respect ya elders !) ; l'association bristolienne de Baileys Brown & Axel Holy (Wonderworld) ; les sonorités plus contemporaines de la scène drill anglaise incarnée par Unknown T (Rise above hate) et K-Trap (Street side effects).

Les rapophiles amateurs de cinéma d'horreur seront comblés par l'album de Clipping, Visions of bodies being burned, fortement inspiré par la filmographie de John Carpenter.

Si vous ne supportez pas le sang, préférez le vaporeux album instrumental de Wyl & Wun Two, We talk tomorrow, qui balance entre jazz et hip hop en mêlant samples et vrais instruments.

 

III – Reggae

Il va falloir apprendre à prononcer son nom : avec Note to self, Jah9 ("Djanaïne") s'impose comme une voix qui compte en Jamaïque. Ce 3ème album est un bel équilibre entre racines et sons contemporains.

Amateurs de sons roots, précipitez-vous sur Hello Africa, dernier album en date du chanteur Chezidek. Textes engagés, références l'Afrique et à Jah, voix forte et grosse rythmique : tous les ingrédients sont présents sur ce futur classique du genre.
Prolongez le plaisir avec Timeless également enregistré en 2020 avec le groupe français The Ligerians (cocorico !).

Le chanteur Liam Bailey est Anglais mais son dernier projet est transatlantique puisqu'on y retrouve Leon Michels, le producteur américain dont nous avons déjà dit beaucoup de bien au chapitre soul. Avec toutes ses influences (soul, rock, r'n'b), Ekundayo reste avant tout un album de reggae, l'un des meilleurs de l'année !

La surprise rétro de l'année nous vient de Suisse : avec Magic rocket ship, Cosmic Shuffling nous replonge dans la Jamaïque du milieu des années 60, quand les styles ska et rocksteady régnaient sur les pistes de danse. Irrésistible !

Pour la suite, direction MusicMe afin d'écouter en ligne le retour discographique des vétérans de Wailing Souls (Back to yard) ; l'entraînant bonbon acidulé de la chanteuse Marina P enregistré avec Mungo's Hi Fi, (Soul radio) ; ou encore Hackney dub des Anglais Conscious Sounds & Partial Crew, album dub de l'année !

Jérôme